Jusqu’en juin 2017, tous les lundis soirs, le Complexe du Rire accueille le pétillant Bienvenue dans la Coloc, écrit par Jocelyn Flipo et Thaïs Vauquières, mis en scène par Yohan Genin. Un spectacle jeune et dynamique, dans toute la tradition du café-théâtre.
On boit de la sangria maison et on discute autour de tapas, les uns collés aux autres, bref : on est au Complexe du Rire, on passe une soirée agréable entre amis, et si l’idée de voir jouer une équipe dans cette atmosphère si peu sage semble étrange aux novices du café-théâtre, le ton est néanmoins donné ; nous sommes là pour rire et profiter ensemble, face à la minuscule scène que les six comédiens vont prendre d’assaut.
Un peu gênée, je pose mes tapas et m’assoie droitement : spectatrice habituée aux salles conventionnelles, je pars pour me comporter en parfait public sage et silencieux. Je zieute un peu les autres pendant la représentation : c’est dingue, les gens rient tout haut tout fort, boivent leur vin, commentent parfois. Et moi, toute coincée sur ma chaise, je suis soudainement ridicule : nous sommes au café-théâtre, merde ; ici, nul besoin d’être sage, d’ailleurs, ça n’a aucun sens. Le public est un garnement intelligent à prendre en compte dans le jeu, je m’en aperçois au bout de quelques minutes. Enfin, le spectateur ose ÊTRE, et sincèrement, ça fait du bien.
Le quotidien de la colocation : étudiants lyonnais, ceci va vous parler !
Ma virginité du café-théâtre étant maintenant partagée, c’est parti pour le décryptage de Bienvenue dans la coloc : le quotidien hilarant de cinq jeunes colocataires, entre histoires d’amour, de cul – il faut le dire –, et les galères quotidiennes que tout étudiant lyonnais ne connaît que trop bien… Entre la fille du proprio compulsivement accro au ménage, le nouvel arrivant sympathique, le chef de bande pas si glorieux que ça, l’étudiante aux Beaux-Arts très libérée dotée d’une étrange collection, et le bon copain à côté de la plaque qui croit aux licornes, sans oublier un proprio quelque peu familier… tous ces personnages hauts en couleur s’agitent autour de situations quotidiennes que nous avons tous connues. Clins d’œil aux loyers impayés, aux squattages de la douche et aux soirées entre mecs (on sait ce que vous y faites, maintenant !).
Blagues et interactions improbables s’enchaînent dans un rythme essoufflé qui ne se relâche jamais, notamment grâce à l’interprétation : le meilleur de Bienvenue dans la coloc, c’est sans hésiter le jeu. Les six jeunes comédiens sont tous plus énergiques et engagés les uns que les autres, assumant jusqu’au bout leurs personnages, jouant sur les réactions de la salle et se nourrissant à chaque instant du potentiel comique offert par le texte.
Le jeu est expressif, efficace, généreux – ce que renvoie la salle, prise entre ces petites scènes hilarantes entre-coupées de musique. Nous n’avons pas le temps de nous ennuyer, car dans chaque scène se fait sentir un goût de vécu. L’autre force du spectacle : faire constamment référence à ce que chacun vit : les quarantenaires vont se reconnaître dans ce prof à peine divorcé, complètement paumé lorsqu’il s’agit de parler à ceux qui ont vingt ans – d’autres vont rire parce que ce genre de situations leur est étrangement familier…
Verdict
On exacerbe les traits de chacun, on grossit les caractères pour qu’ils soient plus parlants, plus drôles, et bien sûr, entre l’énergie et la spontanéité, le tout marche comme une machine. On regrettera néanmoins les caricatures et les clichés, manquant parfois de finesse, ce qui rendrait le spectacle plus grinçant.
Bienvenue dans la coloc, c’est un moment agréable et hilarant à passer entre amis dans un cadre chaleureux. Emmenez-y vos colocataires : fous rires garantis (ou éclats de voix en rentrant, à vous de voir !). Le tout soutenu par une équipe énergique et généreuse : ils aiment être sur scène, et c’est, après tout, le plus important pour un joyeux moment de théâtre.