Kojin est jeune, kurde et homosexuel. Il tente de vivre et de s’aimer dans une société qui ne l’aime pas. Diako Yazdani, réfugié politique en France, le filme et le suit, dans un coin du monde où il ne fait pas bon être dans ses baskets.
L’origine d’un film documentaire sensible
Si vous tendez un micro aux Kurdes, vous risquez de ne pas être déçus. Dans une région où la religion et la culture clanique sont omniprésentes, être homosexuel n’a rien d’anodin. C’est un déshonneur, une maladie, c’est être pédophile, pécheur, c’est avoir un désordre hormonal. Tout se mélange dans les esprits, la peur se mélange à la tradition. Le point intéressant, c’est que jusqu’à l’âge de 18 ans, Diako Yazdani, réalisateur et réfugié politique en France, a été homophobe, bercé par ce que son milieu avait à lui dire.
Lorsqu’il change d’entourage et d’opinion, c’est une colère sourde et une envie d’en découdre qui se détache. Il parlera de ça. Il ne sera pas de ces intellectuels qui se taisent. Il ne fera pas de l’homosexualité un tabou. Car plus que l’orientation sexuelle, c’est la sexualité elle-même, le tabou. Tout est question d’honneur, d’image.
Comment raconter Kojin
Sur la forme, le documentaire est simple. On est au plus près de ce que voit Kojin de ses yeux. La voix off de Yazdani est pédagogue, premier degré. Elle redonne du contexte pour nous empêcher de juger trop durement ce que nous voyons. L’aspect plus surprenant est la volonté de mettre Kojin face aux gens de sa communauté. Ils sont plus ou moins ouverts à la discussion, ils ont plus ou moins envie d’écouter ce que le jeune homme a à dire. Mais les échanges se font, dans un calme relatif. La caméra est presque intrusive dans des situations où nous n’avons pas notre place, et en même temps, elle attrape des tentatives émouvantes de se comprendre.
On est touché, bien sûr. Touché d’entendre les mots si durs dans les bouches de certains. Qui légitiment que l’on tue, que l’on chasse. Et à la fois, on rit presque face aux discours d’un prédicateur musulman, plus fort, plus absurde que ce que la fiction aurait pu écrire. On est aussi mis face à la réalité, celle selon laquelle il reste bien des endroits où il vaudrait mieux ne pas être soi.