Sense 8 : le plaidoyer pour la différence des Wachowskis

Avant de rentrer dans le vif du sujet, il est peut-être temps de dresser un état des lieux du cinéma actuel et de la carrière d’Andy et Lana Wachowski. Ce bilan nous permettra donc de comprendre la raison même de l’existence de cette série totalement antinomique dans le paysage audiovisuel actuel.

Nous sommes en 2013. Steven Spielberg et Georges Lucas prédisent alors pour l’année 2015 l’implosion du cinéma hollywoodien*. En effet, cette année a quelque chose de particulier, à savoir que le nombre de blockbusters est le plus grand de toute l’histoire du cinéma. Jamais Hollywood n’aura dépensé autant d’argent pour sortir autant de films à gros budget en si peu de temps.

Forcément, pour Spielberg et Lucas (qui se sont tous deux éloignés de ce système-là depuis quelques années déjà), cela ne pouvait signifier qu’une chose, à savoir l’effondrement d’un système économique basé sur la rentabilité facile (la grosse majorité de ces blockbusters sont des suites sans âmes, à un Mad Max Fury Road près). Pourquoi ? Tout simplement que si l’on se réfère aux pourcentages, il apparaît qu’un spectateur va en moyenne seulement 2 à 3 fois au cinéma par an, aussi il ne pourra s’y rendre plus de 10 fois dans l’année 2015 afin de rendre tous ses films rentables.

Malheureusement pour nous, ils se sont trompés, ces suites sans âmes,  basées sur du vent que sont Fast and Furious 7 (pourtant bien filmés, on peut lui concéder cela) et peut-être LE nanar de l’année à savoir Jurassic World, explosent les chiffres au point de devenir l’un des plus grands succès de l’histoire pour le premier, et le meilleur week-end d’exploitation pour le second. Quant à Avengers, l’ère de l’étron (ou un titre approchant), s’il n’égale pas les scores du premier volet déjà tout naze, il fait un score des plus honorables (un milliard de recettes mondiales).

Le public aime la soupe, et les studios lui en servent donc jusqu’à n’en plus pouvoir. Voici ce qu’on retiendra de cette année 2015, où les rares blockbusters originaux et inventifs verront leurs campagnes marketing sabotée de l’intérieur par les studios, afin que le spectateur ne soit plus jamais en mesure d’apprécier des œuvres uniques portées par de véritables auteurs. On parle bien évidemment de Tomorrowland de Brad Bird et de Jupiter Ascending des Wachowski qui furent tous les deux des flops (totalement voulus par Disney et Warner) au box-office.

Et c’est justement des Wachowskis dont il est question ici. Car si d’autres réalisateurs de blockbusters tels que George Miller et James Cameron ont décidé de se plier à la politique des studios en réalisant des suites, afin de mieux les court-circuiter de l’intérieur**, les Wachowskis ont simplement décidé de se tourner par la seule voix de sortie pour les esprits libres désirant de réaliser des œuvres cinématographiquement ambitieuses, à savoir la VOD (voie prophétisée également par Spielberg et Lucas en 2013***.

Car les frères et sœurs ont un problème avec le système hollywoodien depuis maintenant plus de 10 ans maintenant, à savoir que sous prétexte qu’ils ont réalisés la saga Matrix, les spectateurs s’attendent à chaque film ni plus ni moins que la même chose. Or, ses véritables auteurs dans tous les sens du terme (ils écrivent, réalisent, et co-produisent chacun de leurs films) ont décidés tour à tour de faire un film pour enfants à la réalisation expérimentale (Speed Racer), un film chorale au montage révolutionnaire tout en raccord analogique et accessoirement le film indépendant le plus compliqué à financer et le plus cher de l’histoire (Cloud Atlas) et enfin un Space Opéra**** au scénario de plus de 700 pages condensé en 2 heures de films mixant la tragédie grecque au langage du jeu vidéo tout en rendant hommage à un siècle entier de space fantasy (Jupiter Ascending).

Désormais, pour leur nouveau scénario de plus de 1500 pages intitulé Sense8, ils décident donc de se tourner vers la plateforme de VOD Netflix, la seule capable de produire ce qui est alors un film ( !!!) de plus de douze heures. Ce scénario, ils ne l’ont pas écrit tout seuls, mais avec Joseph Michael Straczynski, scénariste émérite puisqu’on lui doit notamment une grosse quantité de comics parmi lesquels les très bon Rising Stars et Midnight Nation ou encore une superbe aventure de Spider-man intitulée Coming Home, les fans de Clint Eastwood ont sans doute apprécié son scénario pour le film l’Echange, tandis qu’il a marqué l’histoire de la série télévisée avec la série Babylon 5 (meilleur space opéra télévisuel avec Battlestar Galactica et bien sûr Star Trek). Et c’est justement en 2003 lors d’une discussion à la sortie de Matrix  Revolutions que l’idée de Sense8 va germer dans la tête de nos trois scénaristes :

« Nous avons en commun tous les trois, cette conviction que la tyrannie ne s’épanouie jamais aussi bien que lorsqu’elle parvient à diviser les gens selon leur sexe, leur parti politique ou n’importe quel autre critère. Nous croyons que ce qui nous lie – notre part commune d’humanité, nos rêves, nos espoirs – est plus fort et important que ce qui nous divise. C’est une très belle idée. Mais comment la dramatiser ? ».

J.Michael Straczynski*****

Vous avez dit « génies » ?

Fort du succès critique et public d’House Of Cards, Netflix est alors en pleine recherche de nouvelles séries à produire, et l’offre des Wachowskis et Straczynski est alors une aubaine, d’autant que le network va leur offrir une liberté totale sur leur produit. Non seulement, les épisodes pourront avoir une durée variable, mais aucune censure ne sera opérée, de plus Netflix leur donne le droit de tourner leur série dans les villes mêmes où l’histoire est censée se dérouler (en l’occurence aussi bien aux USA qu’en Afrique, Corée, Islande, Angleterre, Allemagne et en Inde.

De plus, les Wachowski choisissent eux-mêmes les réalisateurs des rares épisodes qu’ils ne dirigent pas. Ils en profitent donc pour réunir leurs fidèles, à savoir Tom Tykwer (réalisateur du Parfum et de Cours, Lola, Cours mais également co-réalisateur de Cloud Atlas avec eux), James McTeigue (réalisateur de V pour Vendetta, écrit et produit par les Wachowski) et Dan Glass (leur responsable des effets spéciaux depuis Matrix Reloaded).

C’est donc sûr d’assurer une certaine fluidité dans la mise en scène qu’ils entament cette série hors normes, remplie de moments incroyables comme seul le cinéma est, en général, capable d’en fournir. Néanmoins, les Wachowski, s’ils ne le disent pas, certainement par humilité, restent conscients qu’ils sont meilleurs que chacun de leur collègues et s’octroient les épisodes les plus complexes à mettre en scène. Car la série, d’une véritable complexité scénaristique, est également un casse-tête cinématographique, le spectateur devant ressentir, par la mise en scène, et donc par des touches de rappel visuelles, les connexions entre des personnages éparpillés à travers le monde, et pouvant parfois, se prêter main forte par projection astrale.

Voici donc, deux exemples de mise en scène, extrêmement complexes, à gérer auxquelles les réalisateurs ont dû faire face (attention spoiler) :

Tout d’abord, une scène de fight où deux personnages prêtent main forte à un troisième situé à l’autre bout du monde :

 

Les réalisateurs capables d’un tel exploit cinématographique se comptent actuellement sur les doigts d’une main. Ce n’est pas tant la perfection des cadres qui prime ici, mais la complexité du montage qui arrive à rendre fluide et surtout parfaitement sensitive la notion même du lien qui unit les protagonistes entre eux.

Une autre séquence en montage alterné, certes plus facile à mettre en scène, mais néanmoins casse-gueule prouve le travail d’équilibriste que représente un tel projet :

Cet hommage clair au film Magnolia de Paul Thomas Anderson (https://www.youtube.com/watch?v=aNmKghTvj0E) permet de parfaire un discours déjà répété plusieurs fois dans la série (mais toujours de manière visuelle, jamais par les mots) à savoir que l’art est une notion essentielle au bien-être de chacun, autant qu’un lien entre les peuples qu’une manière de lutter contre l’oppression sociale.

Si le montage de cette séquence et bien d’autres rappelleront fortement Cloud Atlas des mêmes auteurs, il y a tout de même ici une différence notable, à savoir que le montage fait partie intégrante de l’histoire. Ainsi, tout effet de mise en scène et de montage alterné n’est jamais gratuit puisqu’il permet de ressentir ce que ce que ressentent les personnages et de partager leur vécu. Voici un exemple : Dans le premier épisode, Will, l’un des héros, résidant à Chicago, est réveillé en pleine nuit par le son puissant d’une musique électro.

Comme le spectateur, il croit que c’est son voisin qui en est responsable. Il frappe donc chez ce dernier pour lui demander de baisser. Mais lorsqu’il ouvre la porte, il se rend compte que l’appartement du voisin est inoccupé. En réalité, la musique provient d’une boîte de nuit de Berlin, dans laquelle se trouve Wolfgang. Et c’est sur ce principe de montage alterné que fonctionne la série. Toute la série est montée de cette manière.

Car le véritable pari des auteurs avec Sense8 (jeu de mot avec « sensate » qui signifie «sensitif ») est justement de faire ressentir l’intrigue au spectateur. Tout ici est affaire de sensation, et non d’intellect, c’est pourquoi la plupart des critiques négatives, bien que peu nombreuses, ont fait part de leur déception dû au manque d’action de la série. Car l’idée est toute autre, puisqu’il s’agit avant tout de faire ressentir au spectateur les évènements et non de simplement lui donner des scènes d’actions spectaculaires, certes présentes mais peu nombreuses, mais plutôt des interactions émotionnelles entre les personnages.

Mais surtout, par la mise en scène et le découpage, intégrer émotionnellement le spectateur au sein même de l’intrigue, comme s’il était lui-même le 9ème sensitif. Pourtant, le titre de la série n’est pas qu’un simple jeu de mot puisque le 8 du titre apparait plusieurs fois également avec insistance, non pas comme un chiffre (le fait qu’il y ait huit personnages), mais surtout comme un symbole. Le chiffre huit mis à l’horizontal n’est-il pas le symbole de l’infini, de l’éternel recommencement ?

Or, la série rappelle à maintes reprises que les sensitifs ne sont pas une évolution de l’humanité, mais plutôt des êtres humains normaux présents depuis l’origine, mais simplement non corrompus par la société qui, aurait causé chez chacun d’entre nous la perte de notre sixième sens, à savoir l’empathie. Forcément, on est chez les Wachowski (même si cette notion est également un trait commun avec Straczynski qui l’a notamment développé dans Babylon 5. Il est à présent temps de parler de subversion en évoquant le scénario de la série.

De l’art de la subversion

Sense8 raconte donc l’histoire de huit individus aux quatre coins du monde qui se retrouvent donc liés entre eux après avoir eu la vision du suicide d’une femme. Ils vont chacun apprendre à se connaître les uns les autres en partageant leurs émotions de manière télépathique, et vont peu à peu apprendre à interagir. Ils doivent faire face à une organisation secrète qui tente de les capturer afin d’éviter que leur existence ait des conséquences sur l’humanité (imaginez un peu si un jour, l’être humain cessait d’être purement égoïste ?).

Pour comprendre à quel point Sense8 est tout autant une série sur l’empathie que sur le besoin réel pour l’être humain de devenir le « caillou dans la chaussure» de la société, nous allons présenter chacun des personnages individuellement. Nous allons donc voir en quoi le choix de traiter tel type de  personnage n’est jamais anodin, mais va toujours enrichir le propos de ses auteurs. Si le scénario de la série n’est donc évoqué ici qu’en dernière partie de texte, c’est avant tout car les spoilers vont être nombreux.

Will Gorsky

https://www.youtube.com/watch?v=_LK8qTFpUEs

Le personnage de Will est un flic de Chicago. Il peut passer pour le personnage le moins subversif de la série au début dans le sens où il semble n’être qu’un flic intègre [et dont] le rôle [sert] seulement de faire progresser l’intrigue type « thriller » de la série. Pourtant, il va finir par chercher à comprendre ce que cache le FBI, et à force de fouiner afin de faire éclater la vérité, il va finir par se faire licencier. Par son biais, les scénaristes cherchent à démontrer à quel point l’intégrité et l’empathie peuvent être en total désaccord avec les rouages d’un système qui se veut pourtant comme tel.

Toutes les parties faisant intervenir Will sont filmées à la manière d’une série policière.

Il va jouer un rôle important dans la scène d’orgie de la série qui a créé un véritable scandale de par le monde. Puisque cette scène d’amour tout en montage alternée se veut un véritable plaidoyer pour la liberté sexuelle au-delà de toute notion d’homo ou hétérosexualité prônant avant tout le plaisir de l’être, tout en n’étant jamais vulgaire. Le scandale provient ici surtout de la participation de toutes les identités sexuelles dans la scène en question (Will et Wolfgang étant hétéros, les autres étant homos ou trans) :

https://www.youtube.com/watch?v=9_MO1cJgNvQ

Il est également le personnage qui mène les enquêtes et fait prendre conscience aux autres des évènements. Son prénom est donc « Will », car il est celui qui « veut » et qui fera (« will » en anglais signifiant aussi bien vouloir que le futur). Il tombe amoureux de…

Riley Blue

Le personnage de Riley est une DJ de Londres originaire d’Islande. Elle est probablement la plus sensitive des huit personnages, justement parce qu’elle refuse totalement le monde dans lequel elle vit, et dont elle essaie de s’extirper, d’une part par la musique, et d’autre part par la drogue (on parlait de subversion, non ?)

Lorsqu’elle se situe à Londres, les séquences de Riley rappellent fortement celles de La Double Vie de Véronique, notamment dans la contribution de la musique (tout en rappelant que Sense8 se base sur un principe similaire au film de Kieslowski) qui, bien que franco-polonais, est également un film européen.

Il est important de voir que Riley Blue (bleu, donc comme la couleur du ciel) a mis au monde un enfant désormais décédé qui s’appelle Luna (la Lune donc) et servira de confidente principale au personnage symbolisant le soleil, logiquement appelé…

Sun Bak

https://www.youtube.com/watch?v=CdzHQe4gUMw

Le personnage de Sun vivant à Séoul en Corée est la fille d’un PDG d’entreprise qui n’a d’yeux que pour son fils. Lorsqu’elle découvre que celui-ci lui extorque de l’argent, il demande à Sun de se sacrifier en partant en prison à sa place. Elle est le personnage intègre par excellence en même temps que le véritable martyr, celle qui se sacrifie à la place des autres, mais qui, lors du meurtre de son père par son frère, va préparer sa vengeance, tout comme dans la majorité du cinéma coréen (le film de vengeance donc) qui sert ici de point de référence à la mise en scène, tout comme le montre d’ailleurs l’intensité des scènes de combat.

Car comme vous l’avez déjà vu sur les deux précédents personnages et comme vous continuerez à le comprendre en lisant cet article, la mise en scène s’adapte non seulement au point de vue du personnage, mais également à des genres cinématographiques bien particuliers. Sun servira d’ailleurs d’aide, par ses capacités martiales à…

Capheus, dit Van Damn

https://www.youtube.com/watch?v=dnjIPLIDOMk

Le nom de Capheus est une référence à l’étoile Cepheus, aussi appelé l’étoile Grenat à cause de sa couleur rouge éblouissante et du fait qu’elle est l’étoile polaire de Mars (le Dieu de la Guerre, donc, tout comme Capheus est le pendant martial de Sun, vous avez compris ?). Il est aussi appelé Van Damme, en référence à son camion et à ses capacités martiales, dû au fait qu’il est un fan de Jean-Claude Van Damme. Pourquoi Jean-Claude Van Damme ?

Tout simplement parce qu’il est un symbole d’espoir pour beaucoup de monde. Il restera à jamais le petit belge qui ne connaissait personne du milieu et qui connut la gloire aux Etats-Unis uniquement grâce à son culot. Une gloire qu’il doit à des films prônant la valeur du dépassement de soi et celle du courage, soit celles justement qui définissent Capheus, et qui sont les valeurs inverses de celles que montrent les films de super héros actuels, fort justement critiqués par les Wachowskis (les autres bus, concurrents de celui de Capheus sont peints aux couleurs des super héros hollywoodiens).

Capheus vit à Nairobie et se retrouve embringué dans des histoires mafieuses afin d’aider sa mère à soigner sa séropositivité.

Ici, les wachowskis convoquent deux types de cinéma, celui se déroulant dans les favelas (la Cité de Dieu) en même temps que le cinéma de blacksploitation, à travers les fulgurances martiales de Capheus face aux gangsters.

Le système de la santé est d’ailleurs par ce biais vivement critiqué à la manière de The Constant Gardener puisqu’ici il est grandement question du trafic de médicaments sous toutes ses formes, ainsi que de la corruption policière.

Il sera également aidé par…

Lito Rodriguez

Le mot Lito signifie le sacrifice heureux en latin. Et Lito Rodriguez est un acteur mexicain connu pour ses rôles virils et qui cache justement son homosexualité à [dans] une société homophobe. Il sera libéré qu’au moment de son coming-out (d’où le sacrifice heureux). Inutile d’expliquer la subversion d’un tel personnage, je pense.

Toute sa partie, même si elle peut parfois faire penser à du Pedro Almodovar, est surtout une référence aux télénovellas mexicaines, tandis que les scènes d’actions qu’il joue sont clairement des références au cinéma de John Woo, maître à penser du cinéma d’action pour les Wachowskis depuis leurs débuts.

Il fait partie des personnages dont le message aux yeux des spectateurs est peut-être le plus limpide, et peut-être provocateur pour certains, car les Wachowskis ont clairement compris qu’au lieu de militer contre l’homophobie, il valait mieux créer de véritables personnages homosexuels dont on comprendrait réellement les sentiments et leurs combats contre les institutions. Avec ce personnage, et celui de Nomi, ils ne jugent pas mais cherchent encore une fois à faire ressentir ce que vivent les personnages. Et comme la communauté gay / lesbienne / trans est très importante pour les auteurs, ils relient forcément cette histoire avec celle de…

Nomi Marks

Nomi est un personnage de transexuelle, anciennement homme, devenue lesbienne une fois femme. Elle représente donc une communauté quasiment toujours ignorée du domaine de la fiction. Et son histoire d’amour est sans doute l’une des plus belles vues sur un écran, car portée sans aucun jugement ni militantisme, mais avec un véritable souci de réalisme. S’il est un véritable appel à la tolérance invoqué par Sense8, alors il se trouve sans doute dans cette histoire. L’autre preuve, s’il en est, est que, tout comme Néo dans Matrix, Nomi n’est autre qu’une hackeuse, le fameux caillou dans la chaussure dont on parlait auparavant, donc.

Rappelons également pour ceux qui ne le sauraient pas que les Wachowskis sont désormais un frère et une soeur alors qu’ils étaient auparavant deux frères (Andy et Larry sont devenus Andy et Lana), raison pour laquelle ce personnage semble avoir leur faveur. Son discours sur la raison d’être de la Gay Pride est tellement éloquent et formidablement écrit qu’il sera d’ailleurs repris aux Etats-Unis tel quel par de nombreuses associations américaines et fut même cité en exemple lors de la gay pride de Sao Paolo, le 20 Juin dernier :

https://www.youtube.com/watch?v=f6OHCDdlFYo

For a long time I was afraid to be  who I am because I was taught by my parents there’s something wrong with someone like me. Something offensive. Something you would avoid maybe even pity. Something that you would never love. My mom, she’s a fan of Saint Thomas of Aquinas. She calls pride a sin. Saint Thomas saw pride as the queen of the seven deadlies. She saw it as the ultimate gateway sin that would turn you quickly into a sinaholic. But hating isn’t a sin on that list. Neither is shame. I was afraid of this parade because I wanted so badly to be a part of it. So today I’m marching for that part of me that was much too afraid to march. And for all the people who can’t march. The people living lives like I did. Today, I march to remember that I’m not just a me. I’m also a we. We march with pride. So go fuck yourself, Aquinas.

S’il fallait donc une preuve que le cinéma peut changer le monde, peut-être l’avons-nous trouvé…

Son combat pour la liberté de la femme, entre autres, se rapproche fortement de celui de…

Kala Dandekar

https://www.youtube.com/watch?v=fIjHJ_PENpc

Cette indienne de Mumbai dont le prénom signifie « Destin » est justement celle qui va combattre la destinée qui lui est imposée pour imposer celle qui est véritablement la sienne.

Son segment est filmé à la manière des films Bollywood (danse à l’appui).

Cette indienne va non pas subir un mariage forcé, mais se sentir obligé de reproduire ce schéma que la société indienne lui suggère, alors même que personne ne l’y force. Ce sont donc les coutumes qui lui donnent ce sentiment d’obligation et non la réalité factuelle. Ce mariage avec le fils d’un riche industriel qu’elle n’aime pas donc, alors même que celui-ci semble parfait pour toute sa famille, y compris sa soeur cadette, va faire pencher son coeur par vers quelqu’un qu’elle ne connaît que de manière purement télépathique, à savoir le dernier personnage de l’intrigue…

Wolfgang Bogdanow

https://www.youtube.com/watch?v=FyG8Dp8Shjw

N’en déplaise à Cyril Hanouna, le nom de famille de ce personnage n’est pas une référence aux frères Bogdanov, mais son prénom en revanche est celui de Mozart, tout simplement. Car Wolfgang est quelqu’un qui aurait pu et dû devenir un grand artiste musical si son père ne l’avait pas totalement rabaissé et détruit durant son enfance, ce qui le conduira d’ailleurs au parricide. Son histoire, celle d’un cambrioleur badass aux prises avec la mafia allemande, est clairement une référence aux films de gangsters façon Scorsese et De Palma, avec de plus une séquence de cambriolage au suspense à couper le souffle.

Il est le personnage le plus instable des huit, celui qui cherche à fuir un passé qui ne cesse de le rattraper, jusqu’à ce qu’il embrase enfin sa destinée, nous donnant l’une des nombreuses répliques marquantes de la série, à savoir «ometimes you make a mistake. You’ve got two choices: you live with it, or you fix it.»…

En conclusion…

Je pourrais encore écrire un paquet de choses sur cette série exceptionnelle à plus d’un titre, et même écrire encore plus à la deuxième, voire à la troisième vision tant la portée philosophique d’un tel objet est forte et sa rigueur d’écriture semble regorger de multiples niveaux de lecture. Mais cet article est sans doute déjà assez long comme ça.

Et en attendant une hypothétique deuxième saison (les Wachoskis ayant déjà prévu les scripts jusqu’à la saison 4), je vous laisse avec quelques citations extraites de ce chef d’œuvre absolu :

I love you. That’s why you can’t give up. I love you.

At some point, we all encounter our own parca negra. He is that thing we are afraid of, that thing that stops us from becoming what we know we can become.

Bigger and more high tech a company is, the easier it is to use the front door.

I take everything I am feeling, everything that matters to me, I push all of it into my fist, and I fight for it.

I’m not like Sun. I do not know how to use my fists, but that doesn’t mean I don’t know how to fight.

This is what life is. Fear, rage, desire, love. To stop feeling emotions, to stop wanting to feel them is to feel death.

Van Damme always comes back.

Killing is easy when you can feel nothing.

The past is done with us the moment we are done with it.

I have all these voices in my head, but yours… it’s the only one I can’t live without.

Life and death are always so mixed up together, in the same way some beginnings are endings and some endings become beginnings.

The real violence, the violence that I realized was unforgivable, is the violence that we do to ourselves, when we’re too afraid to be who we really are.

Love is not something we wind up, something we set or control. Love is just like art. A force that comes into our lives without any rules, expectations or limitations.

There’s a huge difference between what we work for and what we live for.

Our fates are governed by the choices that we make.

Many educated people are quite stupid, and many stupid people like to start fights for no good reason on a truly beautiful day.

In the end, we’ll all be judged by the courage of our hearts.

We make choices and life has a way of making us pay for them.

Drugs are like shoes. Everyone needs them, but they don’t always fit.

He’s my brother. And not by something as accidental as blood… by something much stronger. By choice.

Science is another language we use to talk about the same miracles that faith talks about.

It’s not the drugs that make a drug addict, it’s the need to escape reality.

Who can say if it is we who make the choice, or the choice that makes us.

All beauty is temporary. Decay and death haunt every breath we take.

Without the past, there would be nothing to think about, let alone someone to think it.

It’s true we grew up in separate worlds, but the only world I want to live in is one where we can be together.

We all know when people are lying to us, we just don’t want to listen.

*Dans Variety, Juin 2013, Spielberg s’exprime ainsi : « Tout ce qui les motive, c’est l’argent. Ça ne tiendra pas indéfiniment. Ils se crispent de plus en plus sur leur quête de profit. Les gens finiront par se lasser. Et les studios ne sauront rien faire d’autre. Il y aura une implosion le jour où trois, quatre, voire une demi-douzaine de ces films au budget démesuré vont se planter au box-office. Le modèle qu’on connaît aujourd’hui va changer. » tandis que Lucas dira ceci :

« Vous allez vous retrouver au final avec de moins en moins de salles de cinéma, de plus en plus grosses avec beaucoup de belles choses. Aller au cinéma coutera 50, 100 voire 150 dollars, comme un ticket pour Broadway ou un match de foot.

Ce sera une chose chère… Les films resteront à l’affiche un an, comme les shows à Broadway. Et on appellera ça l’industrie du cinéma. »

**la saga Mad Max si elle contient 4 films désormais est composée d’œuvres indépendantes les unes des autres qui pourraient toutes s’appeler autrement, et la future saga que va devenir Avatar ne devrait pas ressembler au film original, comme l’a déjà prouvé Cameron par le passé avec Terminator 2 et Aliens, les deux suites les moins ressemblantes à leur modèle de l’histoire).

***« Ce qui était autrefois l’industrie du cinéma, dans laquelle j’inclus la télévision et le cinéma, passera du côté de la télévision sur Internet » Georges Lucas, Variety, Juin 2013

****Le space opera ou opéra de l’espace est un sous-genre de la science-fiction caractérisé par des histoires d’aventure épiques ou dramatiques se déroulant dans un cadre géopolitique complexe. Suivant les œuvres, le space opera rime avec exploration spatiale à grande échelle, guerres intergalactiques ou rigueur dans le réalisme scientifique. Apparu formellement au début des années 1940, le genre devient très populaire à partir des années 1960 et 1970 avec notamment Star Trek et Star Wars. source : Wikipédia

*****Je tiens à remercier l’article de Nicolas Bonci publié par le site louvreuse.net, sans lequel je n’aurais pas eu connaissance de cette note d’intention.

Image de Jonathan Placide

Jonathan Placide

Chef d'entreprise chez AWD Productions. Réalisateur, cameraman et monteur, Jonathan Placide est le plus ancien journaliste d'ArlyoMag. C'est pourquoi certains l'appellent "Papy". Grand défenseur du cinéma populaire devant l'éternel, il s'intéresse également à la culture geek dans son ensemble, et vous fera profiter de ces passions à travers ses articles.