Les constructions architecturales issues des grandes utopies du XXe siècle répondent-elles toujours aux attentes des habitants ? En partenariat avec le Musée Urbain Tony Garnier, l’exposition Utopies réalisées- Parole aux habitants se propose de rassembler visions d’architectes et témoignages d’habitants autours de cinq sites architecturaux situés aux alentours de la ville de Lyon.
Tout droit sortie de l’imaginaire de l’architecte Jean Renaudie entre 1976 et 1982, la Cité des étoiles de Givors est la première de cette série d’utopies. En avance sur son temps, l’architecte communiste érige cette cité atypique qui rappelle l’époque architecturale de contestation des grands ensembles. Composée d’environ 300 foyers, l’utopie de Renaudie intègre aussi bien la notion confort (présence de services publics et commerces de proximité) que celle d’originalité et de mixité sociale (mélange entre logements sociaux et copropriétés), faisant de la construction un véritable exemple à suivre en matière d’urbanisme comme le prouve le label du Patrimoine du XXe siècle qu’elle a reçu en 2003.
La ville de Villeurbanne abrite quant à elle deux lieux que présente l’exposition : la cité Tony Garnier et le quartier des Gratte-ciel. Figurant parmi les œuvres les plus appréciées de l’architecture du début du XXe siècle la cité des Gratte-ciel est issue, dès 1934 d’une idée révolutionnaire, aussi bien par les techniques de constructions employées comme son ossature métallique empruntée aux Etats-Unis et utilisée pour la première fois en France ou encore par la mise en place d’un chauffage urbain et d’un vide ordure. C’est commandité par le maire socialiste de Villeurbanne de l’époque, Lazare Goujon, que se met en place cette utopie conformes aux idées de socialisme municipal répandues dans les années 1930 en prônant les principes de solidarité et de collectivité et c’est grâce à ce successeur de Jules Grandclément que l’on vient aujourd’hui du monde entier pour contempler l’architecture de Môrice Leroux, même si la cité reste critiquée, notamment pour ses ressemblances avec le style monumental prôné en Union soviétique à la même période.
Enfin les deux sites du Couvent de la Tourette d’Eveux et la cité de Firminy-Vert à Firminy construits par le Corbusier sont mis à l’honneur dans l’exposition du Musée urbain. Parmi les constructions, on peut y reconnaître les principes déployés dans l’une des œuvres magistrales de l’architecte, la Cité Radieuse de Marseille à savoir le principe de l’unité d’habitation cellule proportionnelle à l’homme. L’exposition retrace avec habilité l’équilibre entre individu et collectif et leur relation avec forme et fonction qui ne semble pas avoir pris une ride.
Ces patrimoines vivants et habités trop peu connus du grand public valent toutefois le détour d’une visite sur place pour les plus courageux, ou d’une consultation de quelques photos et vidéos sur le site d’Utopies réalisées pour les autres.
Avec l’ambition de bâtir un monde meilleur, les 5 utopies réalisées de l’exposition semblent nous démontrer que, comme la mode, l’urbanisme est un art qui se renouvelle tout en répondant à des besoins qui restent inchangés.
Cités empreintes d’histoire, ces véritables défis architecturaux font aujourd’hui l’attractivité des quartiers dans lesquels ils se sont établis.
En plus de cette visite non sans inspiration voici une petite liste maison ! Pleines d’espoir ou pessimistes à souhait, vous pouvez lire, relire, voir ou revoir quelques œuvres qui, sans prendre une ride, ont abordé le thème de l’utopie.
En littérature :
Thomas Moore, Utopia (1516) ; Aldous Huxley, Le meilleur des mondes (1932) ; Georges Orwell, 1984 (1949) ; Philip K. Dick, Minority Report (1956) ; Le Corbusier, Vers une architecture (1923) ; Rem Koohlaas, New York Delire (2002)