Pour cet opus du monde d’Abo, je vous emmène en Perse. « La perse ? » ; « Mais c’est quoi ? » ; « Ça existe plus, voyons ! » ; « On parle bien des mecs tatoués dans 300 ? », allez-vous me dire. Et je vous répondrais : oui, techniquement ça n’existe plus, c’est l’une des plus anciennes civilisations fondées et qui a grandi grâce à un brassage ethnique fort ; et surtout je déteste 300 !
Et si je parle aujourd’hui de Perse, c’est que la fête que je vais aborder est une fête vieille d’au moins 3000 ans, et se pratique par les Perses ou autres populations issues de cet empire à travers le monde, quel que soit leurs pays aujourd’hui.
Une fois n’est pas coutume, léger cours d’Histoire pour mieux comprendre notre sujet. Les Perses sont un peuple descendant des Aryens (attention, ici l’utilisation du mot « Aryen » est une utilisation purement scientifique, n’y voyez pas une quelconque allusion au propos avancé par les méchants nazis), communément appelés Indo-Européens. Cette population donc est descendue du plateau centre-asiatique et se divise à l’arrivée en Bactria (Afghanistan), en deux branches : l’une se déplaça vers l’ouest et l’autre vers l’est, allant donc vers l’Iran et l’Inde actuels. La première branche atteint les portes de l’Europe actuel et la seconde s’éparpille dans le sous-continent indien ; nous parlons ici de l’Âge de bronze. Et de cette population sont nées de nombreuses ethnies et civilisations, dont la Perse. Tout ça pour dire que les Indo-Européens sont tous plus ou moins liés. Cette précision est importante pour comprendre la fête qui va suivre. Autre précision, l’Empire perse s’est par la suite étendu, à son apogée, de la Libye à Dehli ; et du Golfe Persique au sud du Kazakhstan.
Le 21 (ou 20 selon les années) mars signe le début du printemps dans le monde et le début d’une nouvelle année pour environ 300 millions de personnes dans le monde dans différents pays comme l’Afghanistan, l’Azerbaïdjan, la Turquie, l’Iran, la Géorgie, l’Inde, le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, la Chine… En clair dans le Caucase, les Balkans, le Moyen-Orient et l’Asie Centrale.
Norouz, Novruz, Nowrouz, Nevruz et tant d’autres orthographes pour désigner le jour nouveau, la renaissance. Pour le secrétaire général de l’ONU, qui a officiellement reconnu la célébration en 2010 — une année après l’UNESCO —, « le Novruz dépasse les frontières, les différends religieux et autres clivages, pour unir les hommes de bonne volonté. […] Faisons en sorte que toutes les personnes qui célèbrent le Novruz puissent le faire dans la joie et avec conviction, et diffusons son grand message d’espoir et de renouveau partout dans le monde. ».
En effet, cette fête antique est tellement ancrée dans les racines de cette population qu’elle est toujours fêtée avec les mêmes traditions et fougues d’année en année, qu’importent la langue, la religion ou la nationalité, le Norouz passe avant.
Bien sûr selon les pays, des variantes se posent. Certains préparent le Haft-Sîn (les sept « S »), en positionnant sept objets dont le nom commence par la lettre « Sîn » et qui symbolisent : la renaissance, l’abondance, l’amour, la médecine, la beauté, la santé, la patience, le printemps et la prospérité. Pour d’autres, le Haft Sîn est un jus de fruits secs. Malgré ces spécificités propres à chaque pays, communément à l’arrivée du Norouz (soit dès le dernier mois d’hiver), il est coutume de faire germer des lentilles ou du blé dans une assiette, qui une fois levés, formeront un petit tapis. À partir de ce moment, les préparations commencent, les rues sont animées et les magasins entrent dans leur meilleure période de vente ! On y achète des vêtements neufs, des ustensiles et des aliments bien spécifiques pour préparer le passage au nouvel an. C’est aussi le moment du grand ménage du printemps, la maison est nettoyée de fond en comble, les tapis sont sortis et dépoussiérés. La fête peut durer de 3 à 15 jours selon les endroits ; on y prend le temps de passer du temps en famille et avec les amis, que l’on va visiter. On sort pour faire la fête où on s’installe pour faire de la divination et lire des poèmes.
Le dernier mardi soir de l’année est célébré le Tchâhar Shanbe Suri : tout le monde sort dans la rue pour y faire des feux et sauter par-dessus, afin d’y jeter leurs maladies et prendre la force du feu. Plus clairement, c’est un rite pour éviter le malheur dans la nouvelle année.
En résumé, le Norouz est une fête antique riche en culture, qui ne se soucie ni de la religion, ni de la langue, ni du pays. Il est un symbole de renaissance, de fraternité et de joie partagé par des centaines de millions de personnes chaque année. Il est encore temps de prendre un billet et de voir les festivités de plus près !