« Mon chéri, pas ça, c’est voulgaire » qu’elle vous dit avec ses yeux.
Mes chéris, Cristina vous conjure de laisser tomber ce vieux pull miteux qui a déjà vécu plusieurs guerres pour vous approprier l’uniforme urban chic de rigueur. Horreur. Une fois de plus, cette vilaine, méchante, que dis-je, opprimante société vous impose une ligne de conduite aux antipodes de votre attitude rebelle, punk à chien, anticonformiste, et j’en passe. En effet, même si ce « pétit chémisier pied dé poule vous irait coumme un gant » , vous n’êtes décidément pas prêt à vous confronter à un reflet qui n’est pas le votre dans le miroir, et on vous comprend. Que faire ?
Certes, votre style ne plaît pas à tout le monde. Trop coloré, trop sombre, trop bohème, trop ceci ou encore trop cela, ne cherchez pas. On ne peut pas plaire à tout le monde, et ce, même armé de notre meilleur sourire ou de notre plus beau costard dont le prix est égal au PIB du Yémen. À défaut de pouvoir contenter l’univers, je vous propose d’apprendre à vous en contreficher. Au diable votre styliste, les émissions sur M6 et l’avis de votre mère qui a toujours quelques chose à redire.
Votre regard quand quelqu’un vous dit de laisser tomber la veste Adidas.
Le confort, votre truc à vous, c’est le confort.
Auparavant, vous aviez l’habitude de coincer vos deux cuissots dans les jambes cruelles d’un jean skinny. De comprimer vos pauvres petons dans d’intransigeants stilettos. Toujours tiré(e)s à quatre épingles. Ou alors vous faites partie de ceux/celles qui ont toujours vénérés les chignons à l’arrache, les joggings Adidas, les bonnes vieilles Air Max, ou mieux encore, les bottes fourrées effet pantoufles. Seuls les vrais savent.
Mais voilà, le problème : vous ne pouvez plus vous passer de cet accoutrement qui rappelle le confort de votre lit. Et ceci n’est pas sans déplaire à votre entourage. Ci-dessous, un petit florilège des remarques les plus entendues de toute la galaxie lorsque l’on préfère se sentir « comfy » :
« Négligé(e) » ; « Pas soigné(e) » ; « Coiffé(e) comme l’as de pique ! »
Ou encore, si vous avez le bonheur d’être un individu dont le numéro de carte vitale commence par 02 :
« Pas très féminine… » ; « Sale » ; « Garçon manqué »
Ainsi, vous pouvez vous contenter d’ignorer ces remarques acides comme une pluie radioactive, pleurer des larmes de crocodile (Lacoste) ou bien méditer sur ces deux pensées.
Dites vous bien que…
- Si vous préférez la douceur d’une paire leggings et d’un sweater pour affronter le monde, c’est tout à votre honneur. Vous portez sur vous la solution à tous les problèmes de votre voisine très pimpante. Vous savez, celle qui n’a pas la main légère sur la poudre Chanel et enfile ses talons hauts pour aller manger un kebab avec Rachida et Melvina rue Chevreul. En effet, cette jeune et douce personne aimerait vraiment atteindre votre level de confortitude. Mais seul vous en connaissez le secret.
- L’habit ne fait pas le moine. Même avec votre dégaine, personne ne saura contenir son étonnement lorsque vous dévoilerez au grand jour vos manières de sang-bleu. Vous récolterez là les lauriers de votre choix. Vous ébranlerez l’univers entier de surprise. Comme le dit si bien Sacha Guitry : « l’élégance est une affaire d’éducation. » Autrement dit, vous avez toutes vos chances de paraître classe en Adidas. Cependant, veillez tout de même à ne pas vous ramener en pyjama le jour de l’enterrement de votre belle-mère. C’est vexant.
Votre tenue pour le Nouvel An. L’effet flou, c’est pour entretenir le mystère.
Vous invoquez des démons tous les dimanches
Enfin, c’est ce que l’on croit. En réalité vous affectionnez les statuettes de chat toutes mignonnes et les jolies écolières japonaises en bas de laine. Tout le monde pense qu’une fois la nuit venue, vous vous transformez en une créature des ténèbres. Mais c’est totalement faux. À défaut d’aspirer les âmes ou de réciter des vers de Baudelaire, un verre de vin à la main, vous passez des heures à peaufiner votre cosplay pour la prochaine Japan Expo. Vous possédez une guitare ou une basse qui trône dans la poussière au grenier. Parce que le grenier, c’est le lieu ou vous vous isolez pour méditer.
On vous croit renfermé, taciturne, voire parfois un peu décalé, mais tout ce que vous voulez, c’est la tranquillité. Bien que votre petite sœur vous pique vos bracelets à piques et cache vos exemplaires de Black Butler sous son lit, votre mode de vie n’est pas très populaire auprès de vos parents :
« Pourquoi tu es triste comme ça ? » ; « Encore du noir ? » ; « Tu veux encore des mangas pour Noël ? »
Et si vous avez le malheur de vouloir vous sociabiliser un peu hors de chez vous :
« T’es trop bizarre » ; « Pourquoi tu te déguises ? » ; « T’es un gamin » ; « Le métal c’est de la merde »
Rassurez-vous, ceux qui n’ont jamais écouté la voix de Simone Simons, au clair de lune, accoudé à la fenêtre, ne pourront jamais comprendre la poésie qui se déploie en vous comme les corolles d’une fleur.
Mais nous savons bien que…
- Dans la croyance populaire, vous êtes un ermite. Au collège et au lycée, on vous écartait de toute manifestation sociale. En réalité, vous n’aviez aucun intérêt à vous mêler aux foules. Très peu pour vous les bals de fin d’année. Peu vous chaut la considération de simples mortels. Vous trouvez la paix et la plénitude loin des agitations inutiles. Sachez que tous les leaders charismatiques vous envient. Eux aussi aimeraient avoir votre classe sans avoir besoin d’en chercher la confirmation auprès des autres. Gardez la pêche.
- Sous cette capuche à oreilles de chats se cache une tête bien faite. Si l’on a tendance à douter de vos capacités intellectuelles, ou pire encore, de vous infantiliser impunément, vous êtes bien trop passionné pour pouvoir vous en soucier. Tel Naruto ou Monkey D. Luffy, vous prenez soin de vos amis et êtes prêts à brandir bien haut votre poing pour les défendre. En plus d’avoir vu plus de 5 fois tous les épisodes de GTO, vous cuisinez vos sushis maison et n’hésitez pas à prêter votre costume de San Gohan à qui est dans le besoin. Ainsi, vous êtes véritablement le meilleur ami dont tout le monde rêve. Vous faites des jaloux.
Surtout ne changez rien, on vous aime comme vous êtes. C’est pourquoi on vous retrouve très vite pour une seconde édition du Guide de Survie Vestimentaire.