Les Garnis, un lieu unique où l’art se réfugie
Du 24 avril au 10 mai Les Garnis ouvrent leurs portes, un lieu unique en son genre où se mêlent différentes formes d’art. A l’abandon depuis cinquante ans cet hôtel retrouve un nouveau souffle grâce à Héloïse et Aurélia Zahédi, les descendantes de la propriétaire.

« Un garni est une chambre meublée louée à la journée, à la semaine ou au mois. C’était un logement très fréquenté par des populations modestes ou encore par la « population flottante ». Les garnis s’attirent au cours du XIXème siècle (…) une réputation médiocre. Pour les bien-pensants le garni est (…) un refuge d’individus aux activités louches – malfaiteurs, prostituées.» (source).

L'entrée des Garnis
L’entrée des Garnis

 

Avec finesse, les deux jeunes commissaires de cette exposition ont transformé ces garnis délaissés en un écrin poussiéreux pour la création. Faute d’héberger des gens de passage, Les Garnis accueillent maintenant des œuvres d’art. Ce lieu d’exposition particulier confère une aura différente aux œuvres qu’il renferme. Dans chaque pièce délabrée, une installation, une sculpture, une performance, un poème ou une peinture contemporaine fait face à un objet ethnographique africain.

La rencontre de l’art contemporain et de l’art brut dans le vieil hôtel délabré donne un mélange surprenant esthétiquement et émotionnellement. Le visiteur déambule librement dans les chambres, les couloirs, les pièces à vivre. La poussière recouvre les quelques meubles qui sont encore là, le papier peint bigarré est d’une autre époque. Bien loin des salles d’expositions blanches et immaculées, Les Garnis proposent quelque chose de différent, d’à la fois plus humain et mélancolique. C’est un lieu où des personnes sont passées, ont laissé une trace et qui est aujourd’hui habité par des œuvres éclectiques et riches de sens. Des vestiges d’un temps révolu amènent à réfléchir sur l’abandon, la disparition et la métamorphose. Les dix artistes exposés ont interprété ces grands thèmes de pensée à travers leurs travaux.

Au cours de leurs déambulations, les visiteurs sont amenés à se retrouver seuls, dans une pièce portant encore les vestiges d’une ancienne vie, en présence d’œuvres contemporaines et d’objets africains. L’œil et le cerveau ne sont pas sur-sollicités, on a le temps de s’arrêter, de réfléchir, de se laisser envahir par le spleen. Dans une chambre par exemple, on peut se contempler dans un miroir qui, relié à un capteur de mouvement, fait apparaître une tête de mort sur notre reflet évoquant l’inéluctabilité de la mort. Cette oeuvre de Tristan Alexandre (Regung des eigenen Inneren) fait écho à une boite à divination africaine posée sur le rebord de la fenêtre. Un peu plus loin, on entend de l’eau, en entrant dans la pièce on se retrouve face à une grande installation florale et bucolique.

En avançant dans le fond de l’hôtel, une odeur de gâteau flotte dans l’air et une petite note nous invite à venir partager un moment. Tout au long du parcours des poèmes sont disposés sur les murs et nous laissent un peu plus pensif, un peu plus contemplatif… Les gravures de Nelly Toussain représentant des corps d’humains hybridés avec des animaux s’accordent et dialoguent avec les statuettes anthropomorphes africaines disposées un peu partout. Au total dix artistes ont installé leurs œuvres dans l’hôtel : Tristan Alexandre, Elisa Bernard, Quentin Derouet, Nicolas Gruppo, Jean Roux, Raphaëlle Serre, Xavier Tabardel, Nelly Toussaint, Arélia Zahedi, Héloïse Zahedi. Tous viennent de différents milieux, parmi eux il y a des chorégraphes, des poètes, des plasticiens, des vidéastes etc… Chacun apporte sa touche et sa propre sensibilité sur les thèmes évoqués plus haut, mais tous se complètent et s’harmonisent.

Les objets de culte africains, plus bruts, faisant face aux interprétations poétiques des artistes témoignent des différentes évolutions et interprétations que chacun peut se faire d’un phénomène universel. Tout cet ensemble de sons, d’images, de matières, de mots, statiques ou non, est une invitation à gamberger physiquement et psychiquement autour de la métamorphose, de la mort, de la vie.

Poème et statuette
Poème et statuette

L’exposition se tient du 24 avril au 10 mai – 16 rue Paul Chenavard au 3ème étage