Après une première soirée de festivités sur les rives du Lac de Miribel, j’avais repris la direction de Woodstower en ce samedi caniculaire afin de rencontrer Corine. Dans un coin d’herbe l’équipe du festival avait installé un salon, canapés de cuir, toiles tendues, aux airs de caravane orientale. Dans un fauteuil Corine m’attend, lunettes de soleil sur les yeux, un verre de thé au gingembre à la main.
ArlyoMag : Bonjour Corine, merci de me recevoir. Je suis contente de te voir ce soir, c’est la première fois que je te verrai sur scène, j’ai découvert ta musique tout récemment en soirée avec des potes !
Corine : Ah génial !
ArlyoMag : C’est le principe un peu en même temps de ta musique je crois, les soirées, l’évasion…
Corine : Ouais complètement ! Y’a ce côté-là et puis le côté dansé, et beaucoup d’humour aussi, du dixième degré.
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ArlyoMag : Alors ton premier EP s’appelle « Fille de ta région », y a un côté kitsch ultra revendiqué, c’est le plaisir coupable, un peu comme les gens qui ont honte de dire qu’ils ont bien aimé Dirty Dancing alors qu’ils l’ont vu 40 fois.
Corine : Ouais ben c’est exactement ça ! Après y a vraiment aussi le côté Minitel, les années 80 avec les téléphones roses et tout ça. Et puis après il y a tout ce côté hommage à ces femmes des années 60, les Brigitte Bardot, qu’on admirait et qui avaient l’air de minauder mais qui au fond savaient très bien ce qu’elles faisaient. Je me suis assez inspiré de ça, même dans mes textes quand j’ai commencé à écrire, c’est vraiment jouer avec la féminité, avec tous les codes et s’amuser de ça.
ArlyoMag : Justement j’ai vu le clip de ta collaboration avec Amélie Pichard, je trouve qu’il y a un côté très Nouvelle Vague, avec cette volonté de redonner une poésie à certains mots, désuets, qu’on n’utiliserait pas forcément où qui seraient connotés.
Corine : Oui c’est ça, une volonté de poser les mots, d’en prendre soin, en utilisant une intonation qui exprime plein d’autres choses dans des phrases très banales. C’est quelque chose dont je me joue aussi dans la vie.
Pour le film d’Amélie Pichard, il y a aussi le réalisateur Bertrand Le Pluard, qui travaille beaucoup dans la mode et qui à la fois a un vrai univers à lui, de performer. Et il m’a demandé d’être l’hégérie d’Amélie Pichard parce que lui aussi vient de là. C’est quelqu’un qui aime filmer comme ça, raconter la femme et rire de tous les codes et les clichés. Travailler avec lui ça a vraiment été un plaisir parce qu’il a ce souci de mettre en valeur son sujet.
ArlyoMag : D’ailleurs il y a un côté très visuel dans tes clips et on sent une envie d’incarner, je ne sais pas si on peut parler de personnage…
Corine : Si si, après je pense qu’on a toutes plein de facettes. Oui Corine c’est moi évidement, et en même temps dans cette féminité y a quelque chose de très théâtral que j’aime exacerber sur scène et je m’éclate avec ça. Et à la fois c’est vraiment aussi la femme que je suis et pour moi y a quelque chose de très naturel là dedans.
ArlyoMag : Du coup tu parlais de féminité tout à l’heure. J’ai vu que tu avais participé au festival Les Femmes s’en mêlent cette année à Paris, et en regardant le line up de Woodstower un peu plus en détail, je me suis rendu compte que dans la programmation, officiellement en tant que chanteuse, il n’y a que deux femmes, toi et la chanteuse d’Agar Agar.
Corine : C’est drôle que tu me dises ça, parce que là quand je suis arrivée je me suis dis « Y a que des mecs » et les regards qu’on pose tout ça… Et en effet Les Femmes s’en mêlent c’est un festival extraordinaire. D’ailleurs ça a été créé par un mec, Stéphane, c’est un mec génial et il est pas du tout contre les hommes mais c’est juste mettre en valeur des artistes femmes. Et grâce à ça j’ai pu rencontrer plein d’artistes féminines. J’ai trouvé qu’il y avait une belle démarche et même si je suis pas pour les trucs ultra féministes, c’est évident que dans la musique il y a plus d’hommes que de femmes. Et là pour Woodstower je suis assez d’accord, je suis arrivée et je me suis dis « Ah ouais que des mecs quoi ! »
ArlyoMag : Certains de tes titres ont été remixés par plusieurs artistes, tu peux m’en parler un peu ?
Corine : Alors il y a une collab qu’on a fait nous avec Polo & Pan sur Pluie Fine, on a vraiment travaillé ensemble et après Lazar Hoche et Plaisir de France c’est eux qui sont venus vers nous et j’ai trouvé ça super aussi. Et je trouve intéressant d’entendre ma musique transformée comme ça, qu’elle se joue en club dans des festivals. Lazar Hoche par exemple tourne partout dans le monde et c’est super de me dire qu’il diffuse ma musique avec son remix.
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Arlyomag : J’ai du coup une dernière question, est-ce que tu as un secret pour entretenir ta magnifique chevelure ?
Corine : Haha, QUEL EST LE SECRET ? Alors déjà j’ai un coiffeur qui est exceptionnel, et ça c’est obligatoire. Il s’appelle Gérald et il me suit depuis le début. Après y a pas de secret, de toute façon il sont complètement cramés, et ça il faut essayer de pas le faire, faut juste les assumer. Donc j’ai pas de conseils particuliers si ce n’est qu’il faut un bon coiffeur [rires].
À peine sortie de la zone d’interview, l’atmosphère de Woodstower me cueille. L’affluence commence au bar, des groupes se forment sur l’herbe pendant que la grande tyrolienne tendue au dessus du site nous survole. J’entends le nom de Corine sur les lèvres des impatients qui commencent à se masser devant la scène. Le temps d’un verre de vin au bord du Lac et il est l’heure de la rejoindre.
Il est 21h30 et la nuit se couche sensuellement sur le Nicolas Stage (non, non, ce n’est pas une blague de mon cru, voyez avec la com de Woodstower) encore tout enveloppé des rythmes délicat de Ménage à Trois, qui quitte la scène pour laisser place à Corine. Et ce sont les musiciens de cette dernière qui lancent le set avec une intro langoureuse, cheveux gominés, moustache fringante, combinaison blanche immaculée (faites un peu un mix entre Sébastien Tellier et le Doc de Retour vers le Futur, et vous aurez un visuel de la chose).
Soudain elle apparaît, perchée sur de hauts talons dorés, ceinte dans une combinaison noire mi peignoir de boxeur, mi robe du soir. Dans son dos, en lettres d’or scintillent ces mots « La Suerte », comme un appel au voyage. Un voyage au pays des minitel et des soirées paillettes, où une jeune femme blonde aux cheveux sauvages recherche son Pierrot disparu en arpentant le dancefloor de sa démarche féline. Corine harangue la foule, l’appelle à la danse et danse avec elle. On regrette que la Marche Nocturne en sa compagnie n’ait duré plus longtemps, mais il faut libérer la scène. Corine salue la foule, frappée par la lumière, regard tourné vers les projecteurs.
Laurine Labourier