Nous l’avons vu la semaine dernière : il fut une époque où, lorsqu’on parlait de soie, tous les regards se tournaient vers Lyon. Il semblerait que de nos jours, ce ne soit plus réellement le cas. D’où la question : Lyon est-elle toujours la capitale de la soie ?
Difficile à dire, dans le sens où on crée à présent assez peu de soie, où que ce soit. Son déclin est venu avec l’apparition de fibres artificielles, à partir du XIXe siècle. Aujourd’hui, seulement 0,1 % des tissus produits sont en soie, et ceux-ci viennent principalement des pays d’Asie. La soie se limite aux articles de luxe, ce qui explique sa rareté.
À Lyon, quelques rares soyeux résistent, continuant à tisser avec les techniques d’autrefois. On citera notamment la manufacture Prelle qui existe depuis cinq générations et qui tâche de faire perdurer le savoir-faire traditionnel en restaurant des tissus, ou en n’en créant de nouveaux grâce à son cabinet de dessin en interne. On peut penser aussi à la maison Tassinari & Chatel regroupant une équipe d’artisans tisseurs qui recréent d’anciens tissus en soie d’après des documents d’archives ou qui réalisent des créations sur commande. Ces deux ateliers utilisent différents métiers à tisser, des plus anciens aux plus modernes, des métiers à bras aux métiers électroniques. Mais, si on compare le nombre de soyeux à ce qu’il était il y a quelques siècles, il paraît presque ridicule.
Pour répondre plus précisément à la problématique « Lyon est-elle toujours la capitale de la soie ? », j’ai choisi de demander l’avis de personnes qui travaillent dans ce secteur et qui se posent cette question au quotidien. J’ai donc rencontré Mme Virginie Varenne, directrice de la Maison des Canuts. Il s’agit d’un petit musée situé à Croix-Rousse racontant l’histoire de la soierie lyonnaise d’hier à aujourd’hui. J’ai également contacté M. Bertrand Demailly, directeur industriel de Tassinari & Chatel que je citais plus haut.
Ainsi selon M. Demailly, Lyon n’a plus été la capitale de la soie pendant une longue période, mais est en train de la redevenir. En effet, on a préféré soutenir d’autres filières, comme la chimie, la pharmacie et le football, tandis que la soie était reléguée au passé. Mais actuellement, de plus en plus d’actions sont mises en place dans le but qu’elle la redevienne (le Festival Label Soie, le Marché des Soies…). « Les Lyonnais se rapproprient la fierté de ce savoir-faire ancestral local. », explique-t-il.
C’est un avis assez différent qu’apporte Mme Varenne de la Maison des Canuts. Selon elle, il n’y a pas eu de période de déclin, mais simplement une période de changement, de reconversion. Elle pense que, si Lyon n’est plus la capitale de la soie, son savoir-faire s’est élargi à d’autres tissus et à l’ensemble de la région Rhône-Alpes. Il est, en effet, important de souligner que la région Rhône-Alpes est aujourd’hui la première région textile de France, ce qui est plutôt méconnu du grand public. C’est dans la région qu’est créée la quasi-totalité de la soie française. Le bassin lyonnais a su rebondir, s’adapter, aller vers d’autres types de textile et ainsi garder tout son rayonnement.
Nous pouvons donc conclure cet article en disant que Lyon restera toujours la capitale mondiale historique de la soie – ce dont les Lyonnais peuvent être fiers -, mais qu’au regard de l’énorme baisse de consommation de ce tissu, la ville n’a eu d’autre choix que de se réorienter, ce qu’elle a su faire de manière admirable.