Le 28 janvier a eu lieu à l’Université Lumière Lyon 2 une conférence sur le thème « Culture : vers la fin des subventions ? » A la rédaction d’ArlyoMag, ce sujet nous a interpellés, et nous avons voulu comprendre l’ensemble des enjeux que cache cette problématique.
Pour commencer, un petit historique… La culture commença à se démocratiser à la création du premier Ministère de la Culture en 1959, démocratisation qui fut grandement améliorée à l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 (merci André Malraux, merci Jack Lang). Tout allait bien sur la planète-culture jusqu’à la crise économique de 2008, une période qui mena les citoyens à suivre de près ce que les collectivités faisaient de leur argent, et à se poser la question de l’utilité de la culture. Mais la question de l’intérêt général ne va-t-elle pas au-delà des questions économiques ?
« Réduire la question de la culture à la rentabilité serait un véritable problème. »
(Romain Blachier, adjoint au maire du 7e arrondissement de Lyon en charge de la culture)
Pour rappel, les subventions sont accordées par différents acteurs : un projet lyonnais pourra ainsi être soutenu par la mairie centrale de Lyon, la métropole, la région, le ministère de la culture ou l’Union Européenne. S’il est refusé par l’un, il pourra être accepté par l’autre, mais attention, ils ne financent pas des projets de même nature et privilégient ceux qui ont un intérêt pour le périmètre territorial qui les concerne, bien sûr.
Les collectivités sont cependant loin de représenter le premier financeur de la culture : leurs quelques milliards d’euros passent bien après les 25 milliards d’euros que les ménages rapportent à la culture, à l’achat de leurs billets d’entrée au spectacle ou au musée. Evidemment, sans public, pas de culture !
Jacques Bonniel, président du musée Tony Garnier, tient à amener une précision : « La baisse des subventions est relative, car il y a aussi un accroissement de l’offre culturelle ». En effet, le budget du Ministère de la Culture a même augmenté, passant de 7 à 9,4 milliards d’euros cette année. Mais les acteurs culturels sont de plus en plus nombreux, et en concurrence pour l’obtention de subventions. Les aides existantes sont souvent renouvelées, mais les nouveaux arrivants dans le secteur culturel sont peu soutenus : et c’est là que réside le principal souci.
« Ne plus subventionner l’entrant, c’est une forme de nécrose, de maladie pour une société. »
(Vincent Carry, directeur des Nuits Sonores)
Et lorsqu’une subvention est obtenue, se pose un nouveau problème : celui de l’indépendance. Le créateur doit parfois se conformer à des exigences du décideur public, car il en est dépendant financièrement. Toutefois, le financement public reste essentiel, car il garantit la place de l’intérêt général dans le projet culturel. Quelle solution alors ? Réponse de Vincent Carry : « Tout l’enjeu des acteurs culturels est de trouver un financement équilibré en gardant leur indépendance. »
En ce qui le concerne, Vincent Carry est parvenu à trouver l’équilibre entre financement privé, public et autofinancement : il gère sa boîte Arty Farty (Nuits Sonores, European Lab) comme un opérateur privé indépendant, avec toutefois 17% de financements publics : une véritable fierté pour lui.
En bref, la culture est un monde difficile, autant pour s’y faire une place que pour la conserver, surtout en temps de crise où l’argent devient centre des attentions. « Nous sommes dans une période d’inquiétudes mais aussi d’opportunités, pense Vincent Carry : il faut réinventer la culture. C’est la transition entre un monde qui peine à disparaître et un monde qui peine à naître. (…) Les grandes institutions culturelles sont vieillissantes, en perte de sens, elles ont de grandes difficultés à se remettre en question quand elles sont en perte de financement. Elles ont peu de vision et de stratégie. (…) Il faut profiter de la crise pour se renouveler, se réinventer. La France et l’Europe ont besoin d’investir dans les jeunes créateurs et la valeur d’innovation. C’est l’avenir de la démocratie ! »
Crédit photo : BDE Science Politique Lyon 2 Charlotte Lescroart