The Dead Lands de Toa Fraser : Bad Ass Maori !
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Comme beaucoup de monde, je n’aurais certainement pas jeté un œil au film de Toa Fraser : The Dead Lands, si sa jaquette n’affichait pas les commentaires dithyrambiques de deux des plus grands cinéastes en activités.

The Dead Lands a en effet reçu des critiques pour le moins élogieuses :

Puissant, Primitif et Bourré d’adrénaline !

James Cameron

 

A voir absolument !

Peter Jackson

Contrairement à ce qui s’était passé pour le ridicule Terminator Genisys, ces commentaires n’ont rien à voir avec du copinage.

Premier élément qui retient notre attention : le film se situe au début de notre ère et raconte l’affrontement du dernier descendant d’un chef de tribu Maori contre ceux qui ont décimé son clan. Or si des films comme l’âme des Guerriers de Lee Tamaori avait déjà comme sujet le peuple Maori, c’est bien la première fois que l’on remonte aussi loin dans l’histoire pour raconter leurs origines. Si on tient réellement à rapprocher The Dead Lands d’un autre film, alors je ne vois que l’immense Apocalypto de Mel Gibson (respect de la langue originale, décors et ambiance similaire, violence frontale).

C’est dire si le film de Toa Fraser est une œuvre rare. Rien que pour cela, il mérite un visionnage. D’autant que le cinéaste fait preuve d’une grande intelligence et a, semble-t-il, compris la leçon de ses aînés. On ne peut offrir un film au dépaysement total (en plus du décor, les personnages s’expriment en langue maori) sans s’appuyer sur une structure linéaire.

Un récit monomythique

Et si la linéarité d’une histoire peut parfois être un défaut, ce n’est pas le cas ici. Fort logiquement, Fraser opte pour le récit monomythique*, ce qui lui confère  une certaine universalité, et accroît l’identification du spectateur au héros. On est donc bien loin de l’histoire de vengeance classique à laquelle on pouvait s’attendre au départ. D’autant que la fin, dans un contexte différent et sans spoiler, est très proche dans sa signification de celle du trop sous-estimé Revenge, de feu Tony Scott. Et si je n’aimais pas tant le film de Scott, je pense que l’on pourrait même dire que la portée du final de The Dead Lands est plus profond.

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Quant à la mise en scène, elle ne peut qu’emporter l’adhésion. Elle se veut contemplative par moment magnifiant les paysages néo-zélandais. Le montage et les saccades s’accélèrent quant à eux dans les scènes d’actions. Cette façon de filmer le combat en plans rapprochés très courts, champ contre-champ et courte focale est encore une fois très proche de ce qu’avait instauré le cinéma de Mel Gibson en 1995 avec Braveheart. Ce qui fut repris aussi bien par Oliver Stone, Martin Scorsese ou encore Peter Jackson, pour ne citer qu’eux.

L’idée originale étant ici que la caméra vient souvent se placer à la verticale pour rendre mieux compte de la complexité des chorégraphies. À certains moments, par son esthétique, et la configuration des placements corporels, le film vient parfois même lorgner vers les illustrations du regretté Frank Frazetta. C’est dire si Toa Fraser connaît ses classiques et ne transige pas sur l’aspect épique de son histoire.

Illustration de Frank Frazetta
Illustration de Frank Frazetta

Un film pas exempt de défauts

Néanmoins, tout n’est pas forcément rose. Cette même mise en scène se permet des écarts assez kitsch de façon régulière lors des flashbacks en utilisant des effets de surimpressions du plus mauvais goût. On peut comprendre l’intention du réalisateur. Par ce biais, il cherche à rapprocher son récit encore plus du mythe, en y apportant une dimension fantastique. Malheureusement, ce qui pouvait passer en terme de réalisation dans les années 1980 a bien du mal à ne pas paraître ringard en 2015. Quant à l’interprétation, si aucun acteur n’est réellement excellent, la plupart restent crédibles. À l’exception du bad guy, campé par un Te Kohe Tuhaka peut-être un peu trop grimaçant.

Au-delà de ces défauts, The Dead Lands est un film à voir et relativement inédit dans le paysage cinématographique actuel. Il est simplement dommage que notre pays ne l’ai pas compris et se soit contenté de la bazarder en DTV (Direct-To-Video), alors que le long-métrage aurait clairement mérité une sortie salle. D’autant que les films néo-zélandais sont rares dans nos contrées, à l’exception de ceux de Peter Jackson et Jane Campion.

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Le quoi ?

* Un jour, nous ferons forcément un article sur le sujet. En attendant, disons que le monomythe est une théorie élaborée par l’historien Joseph Campbell. Selon lui, tous les mythes racontent des histoires similaires, et seules ces histoires peuvent être considérées comme véritablement universelles.

Campbell développe dans Le Héros aux Mille et un Visages l’idée selon laquelle on pourrait établir une seule histoire : le monomythe. Voici une liste non-exhaustive d’œuvres « monomythiques » : Le Seigneur Des Anneaux, Avatar, Matrix, Harry Potter, Star Wars, Mad Max, Happy Feet, Le Monde de Némo, Dragon Ball…

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Jonathan Placide

Chef d'entreprise chez AWD Productions. Réalisateur, cameraman et monteur, Jonathan Placide est le plus ancien journaliste d'ArlyoMag. C'est pourquoi certains l'appellent "Papy". Grand défenseur du cinéma populaire devant l'éternel, il s'intéresse également à la culture geek dans son ensemble, et vous fera profiter de ces passions à travers ses articles.